AVS

Le système suisse de retraite est en danger comme jamais: les rentes versées par le deuxième pilier s'effondrent. Sans un changement de système dans les prochaines années, les baisses de prestations de la prévoyance professionnelle feront tomber une majorité de retraité·e·s dans la misère et la pauvreté. Notre réponse: la fusion du premier et du deuxième piliers, pour des retraites solidaires, durables et publiques.

Les retraites suisses sont fondées sur trois piliers, qui ont une longue histoire, souvent contradictoire. Le consensus de 1973 entre PS, syndicats et patronat a permis la généralisation du système de prévoyance privée en complément à l'AVS, fruit du combat populaire du siècle, gagné par le mouvement ouvrier et la gauche suisse.

Le 2e pilier (LPP) est fragile puisqu'il dépend lourdement de paramètres financiers souvent aléatoires. Parallèlement, il accentue les inégalités entre travailleurs et travailleuses, en particulier aux dépens des moins bien rémunéré·e·s et des femmes. A titre d'illustration, en 2005, l'Office fédéral des assurances sociales débute un comparatif entre LPP et AVS (1er pilier) par une phrase dont l'inquiétude sous-jacente laisse songeur:«[...] la brutale correction intervenue sur les marchés boursiers en 2001 et 2002 a mis en évidence la nécessité d'appuyer les systèmes de retraite sur un financement stable, moins exposé aux aléas des fluctuations de cours. » Depuis lors, les pires prévisions se sont vues confirmées par la crise financière globale depuis 2008, un rendement des actifs durablement faible et les taux d'intérêts négatifs pour les prêts interbancaires de la BNS, sans qu'aucune mesure sérieuse n'ait été prise pour protéger les retraites.

Retraité·e·s dépossédé·e·s

La capitalisation forcée de nos retraites dans la LPP est toujours moins rentable et plus risquée et les nombreuses diminutions de taux (de conversion, de rendement ou encore techniques) imposées par la droite patronale provoquent une baisse substantielle des rentes attendues. Selon nos calculs, un·e pensionné·e de 40 ans en 2003, aura vu ses rentes amputées de moitié par le cumul des ajustements effectués depuis lors! Les bricolages effectués soi-disant pour sauver ce système des trois piliers, en rafistolant le 2e pilier tout en affaiblissant le premier, constituent une politique de régression sociale que nous dénonçons.

La généralisation de la primauté des cotisations (pas de garantie de la rente fixée sur le salaire) et les diminutions des divers taux condamneront très vite une majorité de la population à des revenus insuffisants. Ce seront alors les prestations complémentaires et l'assistance publique qui pallieront à la précarisation des ainé·e·s. Cette socialisation des coûts est inacceptable. D'une période de liberté et de démarchandisation de l'existence, la fin de l'activité professionnelle devient ainsi un moment de déclassement social associé à une précarité indigne.

AVS+ contre Berset

L'immense fortune stagnante et spéculante, de 891 milliards en 2013, placée dans les fonds de prévoyances LPP sont gérés par une clique d'assureurs dont les profits et les coûts sont à la charge de tout un chacun. L'Union syndicale suisse (USS) estime que les assurances privées actives dans ce secteur absorbent 40 % des coûts de gestion, alors qu'elles ne gèrent que 19 % du capital placé. Comme la Suva, l'AVS et les caisses publiques de prévoyance sont les structures les plus efficaces et les plus solides. L'AVS est financièrement saine et permet une certaine redistribution des richesses.

La réponse du Conseil fédéral et du parlement bourgeois, à l'initiative du socialiste Alain Berset, retarde d'un an l'âge de la retraite des femmes et réduit encore le taux de conversion, provoquant une nouvelle baisse de 12 % des rentes. C'est à nouveau inacceptable! L'Union syndicale a décidé d'y répondre par l'initiative «AVS Plus», qui sera soumise au vote le 25 septembre et prévoit une augmentation de 10 % des rentes AVS dès le 1er janvier 2018. Peut-être un peu timorée ou trop tactique aux yeux de certain·e·s, elle a le mérite de proposer enfin une amélioration significative de l'AVS, la première depuis 1973!

Pour une véritable alternative

Lors de son Congrès de mars 2013, solidaritéS avait décidé de proposer à toute la gauche le lancement d'une initiative populaire fédérale pour des retraites sûres et solidaires. Convaincu·e·s qu'il n'est pas possible de réformer la prévoyance professionnelle, nous proposons de fondre celle-ci dans l'AVS, gérée publiquement, de façon décentralisée, et fondée sur un système de répartition avec fonds de réserve.

Cette transformation place la solidarité sociale et intergénérationnelle au centre, réduit massivement le rôle de la capitalisation, accroît sensiblement le montant des rentes pour le plus grand nombre, garantit les acquis et assure ces prestations sur le long terme. Nous pourrions alors enfin avoir un système qui remplisse son rôle constitutionnel et respecte le droit de vivre une vieillesse à l'abri des besoins inassouvis et de la pauvreté.

Le système que nous proposons repose sur la répartition de l'entier des cotisations salariales actuelles vers l'AVS. Il intègre aussi la fortune des caisses LPP au fonds de réserve de l'AVS, dont la rente doit jouer le rôle de tiers cotisant. Les contributions de la Confédération seront maintenues.

Nous avons ouvert une discussion avec le PST/POP pour nous entendre sur un texte d'initiative fédérale que nous défendrions ensemble et comptons bien trouver un terrain d'entente avant la fin de cette année.

Dimitri Paratte

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