lagaucheAprès un premier congrès à Schaffhouse en novembre 2009, qui a jeté les bases d’un regroupement des forces anticapitalistes sur le plan national, le mouvement La Gauche s’est réuni à Lausanne le 29 mai; quelque 200 militants y ont participé. solidaritéS est partie prenante du processus.



Rassembler l’essentiel des forces situées à la gauche du PS et des Verts dans une seule organisation structurée sur le plan national et susciter une dynamique qui incite des militant·e·s non encore engagés dans une organisation politique à rejoindre le mouvement : voilà un projet ambitieux, mais qui apparaît aux yeux de beaucoup comme une nécessité, compte tenu du tournant social-­libéral du PS et des Verts, de l’émiettement et de la faiblesse des organisations anticapitalistes existantes, incapables d’intervenir sur la scène politique nationale, et du contexte inédit de crise économique et écologique qui rend plus urgente que jamais l’émergence d’une alternative anticapitaliste.

Programme, fonctionnement, stratégie
Pour autant, un tel rassemblement, pour être consistant et tenir sur la durée, ne peut se faire à n’importe quel prix. Il nécessite d’abord un socle programmatique commun qui dessine les contours d’un changement social anticapitaliste, démocratique, écologique, féministe. A cet égard, les discussions autour d’un premier document d’orientation politique ont permis de clarifier certains points. D’abord, il a été décidé d’ajouter une référence claire à une transformation de la société sur des bases anticapitalistes, ce qui n’apparaissait pas dans le texte initialement proposé au vote. Ensuite, en y éliminant des expressions pour le moins ambigües, telle l’idée de « codécision » dans les entreprises, susceptible d’être interprétée comme une promotion de la paix du travail et du partenariat social ; à cette formulation initiale, il a été préféré de rappeler l’urgence de défendre les droits syndicaux régulièrement bafoués en Suisse et l’exigence d’une démocratie qui ne s’arrêterait pas à la porte des lieux de travail. D’autre part, un amendement a permis de souligner les liens structurels qui unissent destruction de l’environnement, réchauffement climatique et mode de production capitaliste. Enfin, d’autres amendements, proposés comme le précédent par des militant·e·s de solidaritéS, ont permis d’ajouter une dimension internationaliste et féministe au texte d’orientation qui en était dépourvu.

La priorité : construire des fronts de résistance
La Gauche doit aussi se doter de règles de fonctionnement qui soient à l’image de la société qu’elle veut construire – c’est-à-dire favorisant une démocratie horizontale et pluraliste où les décisions ne sont pas accaparées par une minorité de professionnels de la politique. Si les statuts votés par le congrès sont à cet égard acceptables, c’est surtout dans la réalité et le fonctionnement quotidien qu’aura lieu le test de la démocratie interne : reconnaissance du droit de tendance, circulation des informations et transparence, formations des militant·e·s et mise à niveau des débats pour que toutes et tous puissent y prendre part sont ainsi des gages incontournables de démocratie.

Enfin, le mouvement La Gauche sera inévitablement amené à des clarifications sur la stratégie à mettre en œuvre pour construire des rapports de force sociaux et changer la société. Il y a ici un point sur lequel solidaritéS ne transigera pas : il s’agit de construire une organisation qui ne soit pas la troisième roue du char de la « gauche plurielle », qui ne soit pas obsédée par l’idée de siéger à tout prix – c’est-à-dire en renonçant à son programme – dans des parlements, voire dans des gouvernements, aux côtés du PS et des Verts.

De ce point de vue, la priorité de La Gauche, dans l’immédiat, c’est la construction de fronts de résistance aux attaques néo-libérales et aux politiques d’austérité qui veulent faire payer la crise aux salarié·e·s. Un travail militant dans les syndicats, dans les associations, dans les quartiers populaires et en direction de la jeunesse sont autant de passages obligés pour la reconstruction d’une gauche combative et qui ne cède pas aux illusions électoralistes à court terme.

Hadrien Buclin et Guillaume Thion