2014-05-15-transition-espagnole

Les mensonges de la transition politique espagnole
Amnésie et récupération de la mémoire
La Querelle argentine contre la dictature franquiste

Conférence-débat
Musique et tapas

Jeudi 15 mai · 20h
Maison des Associations
salle Gandhi

avec
José Maria « Chato » Galante

et Soledad Luque Delgado

Ils·elles représentent la Coordination au niveau de l'Etat Espagnol d'appui à la Querelle argentine (CEAqua), un important collectif qui promeut l'unique action judiciaire internationale ouverte contre les crimes du franquisme.

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Chato Galante est membre de l'association « La Comuna » qui s'est constituée en juin 2011 et a pour objectif d'organiser les personnes qui ont combattu dans la dernière période du franquisme : la génération qui à partir des années soixante s'est affrontée à la dictature et a souffert pour cela de la torture, de la prison, de l'exil, de la clandestinité et de divers autres types de représailles. C'est une association indépendante dont la référence idéologique est la lutte pour la liberté, la défense des droits et le désir de construire un monde meilleur et plus juste. Il fut l'une de ces victimes, détenu en quatre occasions et torturé par Juan Antonio Gonzalez Pacheco, alias « Billy el Nino », entre autres. Il a passé quatre années en prison et fut libéré en octobre 1976.

Soledad Luque Delgado est présidente de l'association « Tous les enfants volés sont aussi mes enfants » qui s'est constituée en janvier 2012. Cette association a entre autres buts d'aider les victimes de vol de bébés dans leurs recherches et de promouvoir des activités revendicatives dans le but de sensibiliser, de conscientiser et de mobiliser la société espagnole à propos de l'une des plus graves atrocités que l'Etat espagnol a vécu depuis les années 40 jusque une période de la Démocratie bien entamée. Elle a passé avec sa famille des années à chercher son frère jumeau disparu quelques jours après sa naissance à la Maternité d'O'Donnell de Madrid en 1965. Dans la Querelle argentine, elle est la porte-voix de neuf associations de victimes de ces délits.

 

L'article zéro de la Constitution espagnole est l'amnésie. Cependant, ces dernières années le dénommé modèle de Transition politique espagnol commence à se fissurer.

Pendant l'Etat de terreur et d'impunité qui a duré des dizaines d'années sous la dictature de Francisco Franco, il y avait un plan systématique d'extermination des vaincus, de ceux qui étaient idéologiquement opposés au régime franquiste. Un massacre génocidaire.

Dans une première phase d'exode, environ 550 000 espagnoles durent quitter leur terre. Elles souffrirent d'un exode déchirant et d'une déportation plus cruelle encore. Plus de 113 000 personnes finirent dans des fosses sans avoir pu être identifiées et sans que jusqu'ici elles aient pu toutes être localisées pour les enterrer dignement. Ceux qui n'étaient pas partisans d'un régime imposé par la force souffrirent la répression la plus affreuse, l'expoliation, la prison, les tortures et furent utilisés comme main d'œuvre esclavagiste. Un nombre incalculable de bébés furent séparés de leur mère pour des raisons politiques, idéologiques et économiques pour être vendus ou offerts à des familles « plus adéquates ». Aujourd'hui ils continuent à être considérés comme disparus et vivent sous une fausse identité. De vrais centres de rééducation d'enfants ont été créés où on a essayé de changer la personnalité de milliers d'entre eux et de les détacher de leur milieu familial. Pendant le franquisme de nombreuses personnes furent poursuivies pour leur orientation sexuelle avec les méthodes les plus humiliantes que l'on puisse imaginer. Ces victimes et leur souffrance furent ignorées en grande partie par la société et par l'Histoire, le dictateur Franco et ses suivants ne furent jamais jugés pour les crimes commis.

Malheureusement, la Transition Espagnole et la période démocratique n'ont pas favorisé l'investigation et la réparation des atrocités commises. De fait, pendant les premières années de la Transition, les nostalgiques du régime dictatorial qui, dans quelques cas, continuaient à occuper des postes à responsabilité dans l'Administration, ont commis des crimes terribles. Au nom de la réconciliation, les secteurs de l'appareil franquiste impulsèrent un modèle politique qui n'a pas touché aux privilèges ni aux actes de la dictature, les partis majoritaires de l'opposition acceptèrent. La société espagnole a souffert d'un Alzheimer collectif et les timides tentatives pour récupérer la Mémoire du juge Baltasar Garzon se trouvèrent confrontées à un mur de diffamation qui le mirent sur le banc des accusés. Beaucoup de carrières politiques et de fortunes se firent sous le manteau de la dictature, beaucoup qui en ont bénéficié ne sont pas prêts à ce que l'on leur rappelle le passé. Et même dans l'actualité, il y a encore des activités d'exaltation à la dictature franquiste, par des groupes qui agissent en toute liberté.

Depuis quelques années, avec une conscience de mobilisation et de revendication sociale et politique qui ressurgit, les nouvelles générations veulent savoir ce qui s'est réellement passé. Les anciennes générations avec un sentiment de justice et de dignité exigent que soient jugés les responsables des crimes du franquisme qui sont encore vivants, ceux qui commirent ces crimes contre l'humanité, crimes toujours non reconnus ni jugés par l'Etat espagnol malgré les avertissements des Nations-Unis lors de ses visites en Espagne et retranscrits dans ses rapports postérieurs.

Le 14 avril 2010 s'est ouvert en Argentine l'unique action judiciaire existante jusqu'ici dans le monde contre les crimes du franquisme, la dénommée Querelle argentine. Malgré les entraves du gouvernement dirigé par le Parti Populaire (parti de droite actuellement au pouvoir) pour aller de l'avant, ces quatre dernières années il a été possible d'avancer dans la lutte contre l'impunité beaucoup plus que durant les années de la démocratie. Plus d'une centaine d'associations de victimes et de collectifs des Droits humains se sont regroupés dans la Coordination au niveau de l'Etat Espagnol d'appui à la Querelle argentine (CeAqua), une importante organisation qui diffuse et promeut une action judiciaire au travers d'une grande mobilisation sociale et politique. Mouvement nécessaire pour en finir définitivement avec le silence et l'oubli.

organisation : L@s Indignad@s Españoles en Ginebra, solidaritéS
soutien : attac-Genève, CADTM, L'Autre Syndicat